Friday, December 09, 2005

Chapitre 51 - L'Oeil du tigre

Madison square garden, New York. Dans ce temple du sport, nouvelles cérémonies païennes de ces peuples sans Dieu, une rencontre de boxe qui était suivie peut-être non par l’humanité toute entière, mais par tous les amateurs du noble art et également par tous ceux qui mélangeaient les valeurs chères à Pierre de Coubertin avec la politique. Car l’affiche qui était annoncée en ce soir du 22 décembre n’était pas seulement l’affrontement entre le champion du monde en titre et son challenger, c’était une guerre entre deux conceptions radicalement différentes de la société. Pour la première fois depuis le début de la guerre civile française, l’embargo que les ploutocraties occidentales avaient mené contre la zone libre avait été temporairement levé. De l’autre côté de l’Atlantique, dans tous les kiosques à journaux, la photo en Une du héros du jour, le capitaine de Légion Etrangère Yves Dragaud en grand uniforme, avec ce commentaire, sobre, efficace et terriblement français : “ Vas-y champion ! ”.

La carrière de celui que la presse tradilandaise avait surnommé “ l’archange de la mort ” avait commencé le plus modestement du monde dans une famille de réfugiés franc-comtois que les autorités avaient installé dans une ferme du Cantal. Elevé au pensionnat d’élite “ Saint Bénilde ” ouvert par le nouveau régime à Saint-Nectaire, il se destinait à l’Académie Militaire de Tulle mais la faiblesse de ses résultats scolaires en avait décidé autrement. Il avait alors intégré l’école des sous-officiers d’élite de Saint-Maixant qui formait les cadres des troupes de choc. Son physique de colosse développé et entretenu par des années de travaux dans la ferme parentale en avait un véritable Hercule que l’on aiguilla vers le choix du roi : la Légion Etrangère. Se couvrant de gloire tant sur le front du Forez que dans les quelques opérations extérieures, le sergent-chef Dragaud devint lieutenant au mérite. Lors d’une prise d’armes, il fut remarqué par le ministre des Sports qui persuada le gouvernement de faire de Dragaud la vitrine de la puissance du pays. Devenu rapidement champion de Nouvelle-France catégorie “ super-lourds ”, il se vit refuser de tenter un titre de champion d’Europe à cause de l’embargo frappant Tradiland. Il se trouva que le champion de France de sa catégorie, Kamel Benachour, était présentement détenu dans un camp de prisonniers quelque part en Lozère, capturé avec son unité de “ volontaires ” sur le front du Forez. Le ministre de la Propagande décida donc d’organiser un match entre Dragaud et Benachour à la Halle des Sports de Cournon d’Auvergne… Ce fut cette rencontre qui propulsa Dragaud au rang de héros national.
Droit sur sa chaise comme on lui avait appris à la maison, au pensionnat et à l’armée, Dragaud regardait son adversaire, du moins ce qu’il en restait. Le public de la Halle, totalement acquis à sa cause, bruissait de la rumeur amplifiée par les milliers de poitrines d’une foule en délire… “ DRAGAUD ! DRAGAUD ! DRAGAUD ! ”. L’œil bleu scrutait la chaise où gisait presque son malheureux challenger, avec un mélange antagoniste de pitié et d’indifférence. A l’autre bout du ring, la tête entre les gants, Kamel Benachour saignait comme un mouton le jour de l’Aït el-Kedir. De ses arcades sourcilières éclatées, le sang mélangé à la sueur formait une sorte de voile rosâtre opaque qui lui faisait voir tout flou. Les cris de la foule ne formaient plus qu’une vague bouillie sonore inaudible, et c’est tout juste s’il parvenait à entendre les consignes de son coach qui lui hurlait dans les oreilles. “Kamel, qu’est-ce que tu fous ? Pourris-lui sa race !!! ” Le franco-algérien tourna la tête et vit la forme dansante qui semblait être son entraîneur. C’est tout juste s’il parvint à déglutir : “Trop fort. Il est trop fort… ”. Ce fut ses dernières paroles… Le gong raisonna. La jeune fille en maillot argenté pailleté brandit une fois encore son panneau électronique : 03. Troisième round. Benachour se leva, rassembla en un seul paquet le peu de force et de dignité qui lui restait, et se rua à l’assaut de Dragaud. Il porta deux ou trois crochets et un direct avant l’extinction totale des feux. Le Français esquiva sans peine la dernière attaque lorsqu’il entendit la voix puissante de son manager lui hurler : “ Maintenant !!! ”. Dragaud recule, laissant venir son adversaire… Cinquante centimètres, un mètre, un mètre cinquante… Puis, d’un coup, il frappa au ventre. Benachour sentit ses poumons se vider de leur air. Plié en deux de douleur, il reçut en pleine tête le crochet du droit qui visait sa mâchoire. Il s’écroula comme une masse pour ne plus jamais se relever. “ TRAGEDIE EN TROIS ACTES ” titra le lendemain le quotidien des sports. Dragaud reçut le surnom “ d’Archange de la Mort ” dans un éditorial du Libre Arverne, hebdomadaire officiel du régime, tiré à 500.000 exemplaires.
Dans le vestiaire du Madison Square Garden, le capitaine Dragaud prie comme un chevalier avant le combat. Il se souvient de son ascension, des matchs succédant aux matchs. Il n’était plus retourné au combat depuis sa victoire. La guerre, c’était sur les rings qu’il la faisait… Silence de mort dans l’Arena de Belgrade. Un direct à écorner un taureau fit s’effondrer comme une masse le champion de Serbie Dragan Milosevic, mal en point depuis de longues minutes. Il a tenu quatre rounds contre l’Archange de la Mort… Dans le complexe d’imprimerie de Guéret, les rotatives tournaient à plein régime selon les directives des services du Ministère de la Propagande. Les médiats, y compris ceux qui n’avaient guère de lien avec le sport, consacrèrent au fil des victoires des articles au nouveau phénomène de la boxe mondiale… Képi Blanc, journal de la Légion Etrangère, 80.000 exemplaires : “ Le Capitaine Dragaud, l’esprit légionnaire ”.
Hurlement animal repris par les dix mille poitrines du Futuroscope de Poitiers. Un crochet du droit de Dragaud expédiait dans les cordes et pour le compte Fernando Gonzalez, champion d’Argentine et donné comme le meilleur boxeur d’Amérique Latine… Jeannettes, journal officiel pour adolescentes catégories 1 et 2, 300.000 exemplaires : “ Interview du Capitaine Dragaud : les demoiselles de Malvières incarnent l’idéal féminin ”, suivi d’une présentation de l’immense fratrie Dragaud : son père, sa mère et ses sept frères et sœurs… Au même moment, l’armée lançait une vaste campagne de recrutement : une affiche représentait Dragaud sur un ring dans la partie gauche, le même en grand uniforme dans la partie droite, avec le slogan suivant : “ Deviens comme lui ”. Dans Stars, journal officiel pour adolescents des deux sexes (lectorat majoritairement féminin) catégories 3 et 4 : “ Dragaud : mes victoires sont dues à la supériorité de nos valeurs ”.
Les crépitements des flashs à l’aéroport d’Aulnat mitraillaient le capitaine Dragaud qui débouchait dans l’aérogare en grand uniforme… “ Laissez passer, laisser passer le champion ! ” hurlait le manager à s’en faire casser les cordes vocales. Impossible d’échapper à la nuée de journalistes qui voulaient être les premiers à s’assurer l’exclusivité de l’interview du champion. “ Mon capitaine, après Benachour, vous avez tué au combat hier soir le champion des Philippines Marcos-Lopez, massacré sous vos coups en moins de 300 secondes. Comment vivez-vous cette nouvelle tragédie ? Etes-vous réellement l’homme le plus fort de tous les temps ? ”. “ Foutez-moi le camp les charognards de presse, ou je fais charger la Milice ! Le capitaine Dragaud s’exprimera demain à son camp d’entraînement, au 13e régiment de Légion Etrangère. Vous aurez le loisir de lui parler à ce moment-là, mais laissez-le récupérer… ” s’exclama le coach, visiblement hors de lui et voulant à tout prix protéger son poulain. Rapport du Ministère de l’Intérieur, classé “ Confidentiel ” : “ D’après nos informateurs, de plus en plus de jeunes adolescentes des quartiers ouvriers et de la classe moyenne tapissent leurs chambres des posters de Dragaud offerts dans les magazines pour jeunes. L’expression “c’est top Dragaud ” vient de faire son apparition dans les collèges des zones populaires et signifie “ c’est trop chouette ” ou “ c’est trop fort ! ” .
Dans le mess des officiers du 13e RLE en garnison à Mende (Lozère), un poste de télévision plasma diffusait en boucle les images de la veille qui avaient cloué d’horreur sur leur fauteuil le peuple philippin tout entier. On y voyait le néo-Français, short noir, littéralement mettre à mort le pauvre boxeur de Manille, short blanc, pris sous la tempête dès le premier round et qui ne survécut pas à la correction infligée par un Dragaud plus professionnel que jamais. Aucune haine pour le pauvre Marcos-Lopez. Un TGV n’a pas de haine pour la vache qui se place en travers de la voie. Il était soldat. Tuer faisait partie de son métier… Le coach emmena les journalistes, dont – pour une fois – des étrangers, dans la salle de musculation du régiment, devenue salle d’entraînement du boxeur où ce dernier finissait son échauffement. Fier de lui, le coach montra une machine. “ Vous connaissez messieurs, puisque vous êtes journalistes, cet appareil. Il permet de mesurer la pression des coups. Un boxeur poids-lourd normal atteint 340 kilos psi. Un crack comme Mike Tyson dans sa belle époque, 500 kilos psi… Messieurs. A vous de juger… ” Sautillant sur place, Dragaud concentra toute son énergie et frappa de toutes ses forces sur l’appareil. Les diodes rouges sur fond noir s’allumèrent. Les journalistes en restèrent ébahis, certains sentant leur échine se glacer : 1038 kilos psi ! Plus téméraire, un journaliste américain lança : “ Mais cela signifie quoi tout ça ? ” Un rictus de mépris s’afficha sur le visage de l’entraîneur : “ Cela signifie, mon cher Yankee, que le capitaine Dragaud extermine tout sur son passage et que je ne donne pas 6 rounds au gros lard que vous prétendez champion du Monde… Me suis-je bien fait comprendre ? Alors dans ton journal, écris que le capitaine Dragaud ne fera qu’une bouchée de vos prétendues vedettes dopées comme des bêtes de concours si vous levez votre saleté d’embargo. Fin de l’entrevue… ”. Tradition, mensuel de l’Eglise catholique traditionnelle, 150.000 exemplaires : “ Le Capitaine Dragaud : Je prie Dieu avant chaque rencontre ”.
L’œil fixé sur les écrans géants installés dans les principales salles de cinéma, tout Tradiland regardait le combat qui allait commencer. Le Madison Square Garden était pavoisé aux couleurs des deux nations : le Stars and Stripes américain et le drapeau tradilandais, noir avec la croix argent et les quatre symboles de la société tradilandaise : le Sacré-Cœur, la fleur de Lys, la Croix celtique et la francisque. Toute une histoire nationale récupérée à ceux qui n’en voulaient plus et qui, avant “ le Grand Exode ”, faisaient de gré ou de force partis de la même société et du même pays. Il n’y avait pas une ville, pas un village, dont le cœur ne battit à l’unisson de son champion… La levée de l’embargo contre Tradiland après l’offensive alliée contre ce qui restait de la France avait permis l’organisation de cette rencontre. Il avait fallu d’abord à Dragaud devenir Champion d’Europe, ce qui fut fait au mois d’août en deux rounds seulement contre le tenant du titre, l’Anglais Bruce Wilkinson… L’adversaire de Dragaud fut connu immédiatement : Abdul Siki, Steve Washington avant sa conversion à l’Islam, champion du monde poids-lourds depuis un an. Assis dans son jacuzzi, un énorme collier composé d’une dizaine de chaînes en or massif autour du cou, Abdul Siki regardait les cassettes vidéos des matchs de Dragaud en hochant la tête. “ Tu l’auras quand tu veux ! ” lui lança son manager. Machinalement, le boxeur passa sa main sur son crâne rasé. Il était fasciné par cet uppercut qui frappa au menton Wilkinson et le propulsa la tête la première en arrière comme un pantin désarticulé… Assis sur une table d’étudiant installé dans une salle de projection au centre d’études anthropologiques, le capitaine Dragaud écoutait un scientifique en blouse blanche : “ Suite à des prélèvements d’ADN sur votre adversaire réalisés à partir de sang récupéré sur une serviette lors de son dernier combat, nous avons été en mesure de reconstituer la structure physique de Siki et son génome ethnique. Ses ancêtres étaient originaires du Congo, d’une tribu de l’intérieur dont nous avons pu retrouver des cousins similaires chez notre allié gabonais. Nous y avons sélectionné les éléments les plus musclés et les mieux entraînés, des militaires pour la plupart. Ils seront vos sparring-partners pour vous apprendre à boxer contre un noir. Nous ne laisserons rien au hasard ”. Le lendemain de son retour du Gabon, Dragaud s’embarquait pour l’Amérique à l’aéroport Edouard Michelin d’Aulnat.

Les deux boxeurs firent leur entrée l’un sous les applaudissements, l’autre sous les huées. Le speaker les présenta : “ A ma droite, short vert, mesurant 1 m 88, pesant 105 kilos, le champion du monde en titre, “ le Canonnier de Saint-Louis ”, “ la Panthère Noire du Missouri ”, Abdul Siki !!! ” La foule applaudissait bruyamment son champion. Mais déjà la bronca se faisait entendre… “ A ma gauche, short noir, mesurant 1 m 91, pesant 109 kilos, le champion d’Europe et outsider, “ l’Archange de la Mort ”, “ le Légionnaire ”, Yves Dragaud !!! ”. L’arbitre donna les dernières consignes. Les deux boxeurs se tapèrent mutuellement les mains à travers leurs gants et chacun regagna son coin. Le gong retentit. Premier round. Les deux boxeurs s’observèrent, se testèrent. Siki porta les premiers coups, que Dragaud encaissa sans broncher. Ils tournaient l’un autour de l’autre, comme deux fauves à l’affût, la panthère noire contre le loup blanc, attendant le moment venu de se jeter à la gorge de l’autre. Comme deux joueurs de poker, chacun semblait garder ses bonnes cartes pour le reste de la rencontre. Ne pas se découvrir tout de suite, laisser venir l’autre et frapper le moment venu… C’est Siki qui frappa le premier, mais son direct fut paré par Dragaud qui répliqua par une série de jabs. Les coups étaient retenus, il ne voulait pas s’exposer à une contre-attaque foudroyante de l’autre. Dragaud tenta un crochet du droit éclair mais la réplique de Siki fut aussi vive. Au Bunker Palace, la télévision plasma du service d’information avait été montée dans le bureau impérial où l’Imperator suivait la rencontre avec Grand, le ministre de la Propagande, et Malard, le ministre des Sports… le rictus qui plissa le visage de l’Imperator lorsque un uppercut de Siki envoya rebondir Dragaud dans les cordes en toute fin de round, fit que le ministre des Sports en renoua sa cravate, mal à l’aise et avalant sa salive…
Dans la salle, la foule était hystérique, elle avait dans la bouche le goût du sang… 2e round : Dragaud met Siki en difficulté, mais le boxeur noir parvint à se dégager… Les coups commencent à tomber de plus en plus drus. Le combat était titanesque : la force impressionnante de Dragaud était compensée par l’expérience de Siki. Chacun pouvait à tout moment remporter la victoire. Sous le mot “ ROUND ”, le panneau électronique afficha en diodes rouges le chiffre 4. Les deux boxeurs se neutralisaient pour le moment. Le public hurla sa joie quand un direct de Siki fit plier Dragaud, cria sa colère quand le Français expédia un uppercut violent qui ouvrit le menton de son adversaire… Miss Etats-Unis monta une nouvelle fois sur le ring avec son atroce robe rose à paillettes qui était censée mettre en valeur sa peau caramel de Latina. Elle fit un tour sur elle-même brandissant le panneau indiquant qu’on entrait dans le 6e round. Les deux hommes saignaient maintenant, les arcades sourcilières ouvertes, les mentons écorchés.
Ce n’était plus un match, c’était une corrida, avec double descabello… Petit à petit, leur jeu se déstructuraient, ils avaient perdu toute technique. Ils frappaient de plus en plus fort. Dragaud reçut dans le ventre un coup qui aurait assommé n’importe qui, mais le gong le tira d’affaire. Les chiffres dansaient : 7e round, 9e round, 11e round, 12e round… A Harlem, partout où il y avait des télévisions, les Noirs interpellaient leur champion à travers l’écran : “ Yo Brother ! Tue, tue, tue le cochon blanc ! ”. De l’autre côté de l’Atlantique, dans les bars des quartiers ouvriers, mêmes encouragements pour Dragaud : “ Vas-y mon gars ! Défonce-lui la gueule à l’autre babouin ! ”. En temps de guerre, l’ennemi n’est plus un être humain. Il n’est qu’un animal. Pas question de “ babouins ” ou de “ cochons ” tant au Bunker Palace qu’à The White House, mais les deux chefs d’état ne perdaient pas une miette du spectacle qui aurait un grand retentissement dans leurs nations respectives. Sur le ring, les jeux de jambes perdaient de leur finesse, les coups se faisaient moins précis, les périodes d’accalmie plus longues. Le pénultième round s’acheva. Les deux boxeurs étaient en stricte égalité aux points. Tout se jouait maintenant.
15e et dernier round. L’ heure des choses sérieuses était venue. Les deux boxeurs étaient assis sur leurs chaises, épongés par leurs staff médicaux. Ils se défiaient de loin. C’était celui qui arriverait à faire céder l’autre. Ce n’était plus le combat entre deux hommes, cela ne l’avait jamais été, c’était le combat entre deux pays, deux idéologies, deux continents, deux religions, deux races. Ils avaient éprouvé tour à tour du respect, de l’admiration, de la méfiance pour l’autre. Mais maintenant, c’était terminé. Il y avait trop d’enjeux. Ils étaient deux pions sur l’échiquier. 14 rounds à se taper dessus, sans voir arriver la victoire. 14 rounds à espérer voir l’autre céder pour rentrer triomphant chez soi. 14 rounds… Il n’y avait plus de boxe, il n’y avait plus de cause, il n’y avait plus de sport. Il n’y avait plus qu’un grand sentiment unique, partagé de concert par Yves Dragaud et Abdul Siki. A cet ultime manche de trois minutes, il ne restait plus que la haine… Dragaud s’entendit appeler. Il se tourna. C’était une jeune femme, 20-25 ans peut être, avec les traits caractéristiques des filles du Middle West. Elle était parvenue à s’approcher du ring. Elle lui lança en français, avec un fort accent de l’Iowa : “ Capt’ain Dragaud. Vous avez reçu mon listing ? Vengez-les, vengez-nous tous et toutes !!! Give us hope !!! ” Déjà les vigiles la raccompagnaient de force à son siège, mais elle eut encore la force de hurler : “ We must secure the existence of our people and a future for White children ! ” Dragaud se souvenait de cette enveloppe, parvenue dans sa chambre d’hôtel. Une compilation d’articles de presse, de crimes racistes commis par des noirs contre des blancs aux Etats-Unis et dont les victimes n’avaient pas été reconnues comme telles. La plupart des faits étaient vieux de quelques années, Dragaud s’en souvenait pour l’avoir lu dans la presse dissidente… Les noms sonnaient dans sa tête… Tiffany Long, 10 ans, de Burlington (Caroline du Nord), violée et torturée à mort par des noirs des deux sexes ; le couple Bagley de Killenn (Texas), brûlés vifs par des noirs en allant à la messe ; Melissa Mac Laughlin, (Caroline du Sud), violée, torturée à mort et pelée vive par un gang noir ; les cinq blancs de Wichita (Kansas), la joggeuse de Central Park… Oui, il ne les avait pas oubliés, pas plus que 90 % des crimes racistes aux USA étaient commis par des Noirs contre des Blancs, ce qui avait été toujours occulté… Dragaud se leva de son siège et marcha calmement vers le centre du ring…
Le silence régnait au Madison Square Garden. On aurait entendu voler un portefeuille… La mise à mort commençait. Dès le début, le Français se précipita à l’assaut de l’Américain. La fatigue avait émoussé la technique de ce dernier et maintenant, la force brute du légionnaire primait. Il entama une série de directs qui fit baisser la garde de son adversaire. Le cri de Dragaud, inhumain, guttural, monta du fond de ses tripes : “ EEEEEEUUUUUAAAAAAHHH ! ”. Crochet du droit. Siki vacilla en reculant de trois pas. Crochet du gauche, il rebondit dans les cordes. Nouveau crochet du droit, il se plia en deux. Uppercut au menton et le boxeur noir s’écroula. Il se releva à 6 avec difficulté. Dragaud était parti à l’assaut et la question qui se posait était simple : Siki tiendrait-il jusqu’à la fin du round ? Pour infirmer les prédictions de ceux qui le voyait perdre, le Noir contre-attaqua, et martela son adversaire au niveau des abdominaux, tentant, de s’extirper de son emprise. Mais Dragaud était survolté. Il entama une nouvelle série de crochets et d’uppercuts qui faisait ballotter Siki. Ce dernier retomba au sol mais se releva rapidement et essaya de contre-attaquer… Une pluie de coups s’abattit sur lui et un crochet sec le fit choir encore une fois… Il se releva péniblement alors que l’arbitre avait compté huit. Il restait moins d’une minute mais Siki était devenu un punching-ball humain. Il encaissait espérant tenir encore les quelques dizaines de secondes restantes… Changeant la localisation de ses coups, Dragaud procéda comme un bûcheron abattant un arbre, harcelant son adversaire aux flancs. Les coups, portés avec une violence inhumaine, usa progressivement la résistance de Siki. Il ne restait que 20 secondes. Hagard, l’Afro-américain baissa sa garde. Dragaud recula en sautillant, prit son élan et de toutes ses forces frappa comme une mule en hurlant comme jamais être humain n’avait hurlé. Son adversaire s’effondra comme une masse. 1… 2… 3… 4… 5… 6… 7… 8… 9… KO !!! Le silence dans le Madison Square Garden. Un silence de mort. Pas un sifflet mais pas une acclamation. Une salle qui se vidait lentement… Yves Dragaud saisit la ceinture dorée de champion du Monde et la brandit à bout de bras. Il était venu pour vaincre, il avait vaincu. Il avait hâte de rentrer chez lui. Ce pays lui faisait horreur. L’avion qui le ramenait au pays décolla de l’aéroport JFK. Alors que l’avion survolait les eaux bleu-vert de l’Atlantique, le capitaine Dragaud esquissa un sourire. Il retournait parmi les siens…

1 Comments:

Anonymous Anonymous said...

BON DEPART

8:50 PM  

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